Gaspillage alimentaire en grandes surfaces : Un super marché de dupes

Les chiffres honteux du gaspillage alimentaire en France

Quand on compare les chiffres liés à la pauvreté en France et le gaspillage alimentaire on attrape vite le tournis ! Jugez-en plutôt :

En France, 8,6 millions de personnes vivent avec moins de 964€ par mois (source INSE 2013) et 293 millions de repas sont distribués par an par des associations caritatives (restos du cœur, banques alimentaires etc.) aux plus démunis. Les mères seules avec enfants arrivent en tête des bénéficiaires (40%), suivies des personnes âgées et des jeunes. La progression de ces Français « pauvres » (augmentation d'un million entre 2004 et 2013), liée à la situation économique difficile et à l'augmentation constante du chômage, est également très inquiétante.

Dans un tel contexte, on pourrait s'attendre à ce qu'un pays évolué comme la France lutte contre le gaspillage des denrées alimentaires et prenne des mesures radicales contre ce fléau qui concerne chaque citoyen, chaque consommateur, chaque parent que nous sommes. Eh bien pas du tout ! En France, 140 kg de produits alimentaires comestibles (par habitant) sont jetés à la poubelle chaque année et 9 millions de tonnes par an de denrées alimentaires finissent dans la benne à ordures (source ADEME, Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de l' Energie) dont 2,3 sont perdues par les grandes surfaces (5,2 millions pour les foyers et 1,6 million pour la restauration).

La loi est-elle-suffisante pour endiguer le phénomène ?

Conscients de la nécessité de trouver des solutions pérennes et efficaces contre le gaspillage alimentaire dans la grande distribution, différents élus dont le député PS Guillaume Garot ont proposé un texte de loi visant à mettre en place différentes mesures telles que :

- L'interdiction de rendre les produits invendables par aspersion de javel ou d'ammoniaque

- L'interdiction de jeter des denrées alimentaires en prétextant des raisons d'hygiène

- Faire de la prévention auprès des GMS (respect de la chaîne du froid, tri régulier des fruits et légumes, mise en chambre froide etc.)

-Recycler certains produits (comme par exemple les gueules cassées, en fruits et légumes) pour la consommation ou pour la transformation de produits destinés aux animaux

La nouvelle loi oblige désormais l'établissement d'une convention pour les dons de denrées alimentaires aux associations caritatives. L'idée est séduisante mais dans la pratique, elle se révèle très compliquée à mettre en place en raison du manque de moyens des structures associatives tant au niveau du stockage que du nombre et de la disponibilité des bénévoles.

Fruits et légumes non conformes à la vente ou le délit de sale gueule

 

Il est bien connu que la grande distribution à pour objectif premier de faire du chiffre d'affaires donc de vendre en masse en privilégiant la quantité au détriment de la qualité dans la plupart des cas. Et pour vendre de grandes quantités de produits au consommateur, il faut flatter son sens le plus adapté à l'acte d'achat : la vue. Les fruits et légumes représentent l'exemple le plus flagrant de cette vente « aguicheuse » qui déclasse la marchandise non conforme aux critères de « beauté » et la jette à la poubelle. En amont de cette absurdité, les producteurs jouent aussi un rôle en effectuant un pré-tri destiné à calibrer les produits et à jeter ceux qui sont jugés invendables aux différents réseaux de distribution. Chaque année c'est un quart de la production qui est ainsi sacrifiée pour répondre aux exigences capricieuses du marché.

 

 

Lutter maintenant contre le gaspillage alimentaire pour les générations futures

 

Le gaspillage alimentaire est le syndrôme d'une société de consommation effrénée qui oppose et/ou privilégie la production industrielle à l'écologie, l'aspect visuel et vendeur à la qualité nutritive et gustative, les intérêts économiques de la grande distribution et des grands groupes agroalimentaires aux producteurs locaux, l'appât du gain à l'éthique humaniste et sociale.

 

Au plan environnemental, le gaspillage alimentaire cause une énorme perte des ressources naturelles, pollue les sols et les nappes phréatiques, génère un trafic routier et la gestion de déchets préjudiciables à l'environnement et accélère le réchauffement climatique (impact carbone, émission de gaz à effet de serre). La production d'un kilo de viande par exemple, correspond à 15m3 d'eau dépensés pour sa production. Le coût du gaspillage alimentaire au niveau mondial est estimé à 750 milliards de dollars par an ce qui représente une quantité de 1,3 milliard de tonnes donc environ 1/3 des denrées produites dans le monde.
De quoi nourrir le milliard d'êtres humains qui dans le monde souffre de la faim !

 

Lutter contre le gaspillage alimentaire c'est aussi lutter contre le réchauffement climatique et préparer l'avenir de notre planète qui avec un bond démographique spectaculaire, portera sa population de 7,5 milliards en 2016 à 9 milliards en 2060. D'autre part, la réduction des surfaces agricoles due à la déforestation, à l'érosion et à la désertification ainsi que la stagnation de la production de céréales et la surpêche, donne des prévisions très pessimistes sur l'état de la France et du Monde de demain. Pour certains, la création d'une agence nationale contre le gaspillage alimentaire permettrait de mieux gérer les rebuts des réseaux de distribution de produits alimentaires, de la petite épicerie de quartier à l'hypermarché de type Géant Casino, Auchan, Leclerc, Carrefour ou encore Intermarché. Une bonne coordination entre les acteurs économiques (producteurs et distributeurs) et les associations serait sans doute la meilleure solution, sans oublier celui qui doit avoir une importance capitale dans les débats : le consommateur.

 

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