En 2060, un tiers des Français aura plus de 60 ans. Et les personnes âgées de plus de 85 ans seront près de 5 millions, contre 1,4 million aujourd’hui.
La « révolution de l’âge » impose de revoir notre vision de l’âge : elle n’est pas la marque d’un déclin, mais bien au contraire le signe d’un progrès considérable pour la société française.
Elle génère de nouvelles exigences de solidarité et valorise le lien social et intergénérationnel. Elle constitue aussi une opportunité économique réelle, susceptible de créer des milliers d’emplois dans les prochaines années.
Le gouvernement a fait le choix d’une loi d’orientation et de programmation, inscrivant la totalité de la politique de l’âge dans un programme embrassant toutes les dimensions de la prise en compte de l’avancée en âge et confortant le choix d’un financement solidaire de l’accompagnement de la perte d’autonomie.
Ce projet se veut porteur d’un projet global pour les années à venir, avec des actions de court et de moyen termes. Il s’adresse aussi bien au retraité actif, qui souhaite continuer à s’investir dans la vie de la cité, qu’à la personne âgée qui commence à ressentir une fragilité et à la personne en perte d’autonomie qui doit pouvoir bénéficier de la solidarité nationale.
Voici donc en détails, les principales mesures de la loi. Le projet de loi repose sur trois piliers indissociables :
- L’anticipation, pour prévenir la perte d’autonomie de façon individuelle et collective
- L’adaptation de notre société tout entière à l’avancée en âge
- L’accompagnement de la perte d’autonomie, avec pour priorité de permettre à ceux qui le souhaitent de rester à domicile dans de bonnes conditions le plus longtemps possible
- Il constitue une première étape législative. Une seconde étape portera sur l’accompagnement et la prise en charge des personnes âgées dans les établissements et intégrera notamment des mesures permettant de réduire le poids financier de l’hébergement pour les âgés qui résident en maisons de retraite médicalisées et pour leurs familles.
Un groupe de travail sera mis en place dès le mois de mars pour définir ces mesures qui seront mises en oeuvre dans la seconde partie du quinquennat.
Pour cette première étape législative, le financement de la loi reposera exclusivement sur la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA), votée pour financer la loi d’adaptation de la société au vieillissement, et dont le rendement est estimé à 645 millions d’euros par an. Ainsi, la CASA répondra bien à sa vocation et sera pleinement affectée à la politique de l’âge dès 2015.
PREVENTION
L’âge est un facteur d’accélération d’inégalités sociales et de santé qui entraînent un risque accru de perte d’autonomie. Prévenir tout au long de la vie la perte des capacités physiques et psychiques, repérer les facteurs de risque sont des priorités.
La réforme permettra, d’une part, de proposer, chaque fois que nécessaire, des programmes de prévention adaptés et, d'autre part, de faciliter le recours aux aides techniques pour retarder la perte d’autonomie. Pour notre société, il s’agit d’anticiper, au lieu de subir, le vieillissement de nos concitoyens, dont les effets sur l'autonomie ne sont pas une fatalité : la priorité à la prévention de la perte d’autonomie est partagée.
Inscrire un volet « personnes âgées » dans la stratégie nationale de santé, la santé des personnes âgées figure parmi les grandes priorités de santé publique faisant l’objet d’une approche intégrée identifiées dans la feuille de route de la Stratégie nationale de santé présentée par Marisol Touraine en septembre 2013. S’agissant de la meilleure coordination des interventions des équipes soignantes et sociales, le projet PAERPA (Personnes Agées En Risque de Perte d’Autonomie), déployé depuis septembre 2013, va permettre aux huit régions pilotes de sélectionner les premiers porteurs de projet. PAERPA financera l’expérimentation de nouvelles pratiques professionnelles pour optimiser le parcours de santé des personnes âgées de plus de 75 ans dont l’état de santé est susceptible de s’altérer pour des raisons d’ordre médical et/ou social.
Améliorer l’accès aux aides techniques et aux actions collectives de prévention, aménager son domicile et recourir à la téléassistance et à la domotique sont des moyens –souvent simples- de prévenir chutes et perte d’autonomie. Or, le soutien au domicile des âgés repose aujourd’hui presque exclusivement sur l’aide humaine et ne permet pas suffisamment de développer des projets individuels de prévention. Par ailleurs, de nombreuses actions collectives de prévention pour les âgés sont organisées, mais elles restent dispersées, peu lisibles et trop méconnues.
La loi organise des programmes cohérents de prévention prévoyant notamment la promotion d’une activité sportive et d’une meilleure nutrition, des règles de bon usage du médicament, des actions de lutte contre le suicide, une mobilisation contre l’isolement. Elle apporte également des moyens financiers pour mieux solvabiliser l’accès aux aides techniques et aux actions collectives de prévention, en ciblant les ménages les plus modestes, quel que soit leur niveau de perte d’autonomie. Il s’agit de permettre un accès plus large aux aides techniques et de développer les actions collectives de prévention.
140 millions seront ainsi consacrés à ce volet prévention, par des moyens délégués aux « conférences départementales des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie ». Créées par la loi, ces organisations nouvelles associeront, sous la présidence du conseil général, les caisses de retraite, l’agence régionale de santé (ARS) et les autres acteurs volontaires (mutuelles, etc.). Au sein de ces Conférences, les caisses de retraite, organisées à leur initiative en inter-régimes, joueront un rôle central pour garantir un continuum de prévention et de prise en charge.
ADAPTATION
Développer des politiques de l’habitat et de l’urbanisme prenant mieux en compte l’avancée en âge. Il s’agit d’intégrer systématiquement dans les programmes locaux de l’habitat (PLH) comme dans les schémas gérontologiques, un volet relatif à l’habitat des personnes âgées (adaptation des logements, développement d’une offre adaptée et diversifiée). La dynamique « Villes amies des aînés » permettra également de mieux mobiliser les outils d’urbanisme. Lancer un Plan national d’adaptation de 80 000 logements d’ici 2017. L’adaptation de la société au vieillissement, comme la priorité donnée au domicile, imposent de conduire un effort tout particulier dans le domaine du logement des âgés et de soutenir l’effort d’adaptation des logements privés. Celui-ci sera notamment porté par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV), dans le cadre d’un plan autonomie pour l'adaptation de 80 000 logements privés sur la période 2014-2017. Pour permettre d’atteindre cet objectif, le budget de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) sera abondé en 2015 et 2016 d’un versement de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) de 40 millions d’euros. Ce plan permettra également de mieux détecter les besoins des âgés, d’accompagner les propriétaires et d’améliorer les financements conjoints de l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) et de la Caisse nationale d’assurance-vieillesse (CNAV).
Donner un nouveau souffle aux foyers-logements, rebaptisés Résidences Autonomie
Les logements dits « intermédiaires » sont une bonne solution pour les âgés qui ont besoin d’un accompagnement pour préserver leur autonomie, tout en souhaitant rester « à domicile ». Les foyers-logements font partie de cette palette de réponses proposées aux âgés qu’il faut continuer de développer et diversifier, et pour certains mieux adapter. La loi entend donc donner un nouveau souffle aux foyers-logements, rebaptisés « Résidences Autonomie », grâce à la création d’un « forfait autonomie » qui permettra de renforcer leurs actions de prévention, pour un montant de 40 millions d’euros. Par ailleurs -démarche inédite- l’État participera à la rénovation des foyers-logement, via un Plan exceptionnel d’aide à l’investissement de 40 millions d’euros qui s’ajouteront aux 10 millions d’euros déjà dégagés en 2014.
Promouvoir une « silver mobilité » pour les âgés dans les politiques locales de transport via notamment les plans de déplacement urbain (PDU), créer un volontariat civique senior, qui valorise l’engagement républicain bénévole des âgés, développer la cohabitation intergénérationnelle qui permet de faire se rencontrer la solitude d’un âgé et le besoin en logement d’un étudiant.
Affirmer les droits et libertés des âgés, en réaffirmant fortement les principes fondamentaux que sont la liberté d’aller et venir ou le respect du consentement lors de l’entrée en établissement, et en les protégeant des excès du marché et des abus auxquels ils sont particulièrement exposés.
ACCOMPAGNEMENT
Près de 1,2 millions de personnes bénéficiaient de l’APA fin 2011, dont près de 700 000 à domicile (60%). L’APA permet d’accompagner les plus dépendants (GIR 1) mais aussi, et c’est essentiel, de préserver l’autonomie des âgés en situation de fragilité (GIR 4). Pourtant, cette prestation connaît aujourd’hui les limites : en 2011, un plan d’aide sur quatre était saturé (c’est-à-dire atteignait son plafond). C’était même le cas pour près de la moitié des plans d’aide pour les plus dépendants. Par ailleurs, de nombreux bénéficiaires y renoncent en partie pour des raisons financières. Enfin, la qualité de l’intervention peut être améliorée par de meilleures conditions de travail des professionnels.
Une APA plus généreuse : Les plafonds d’aide mensuels de l’APA seront revalorisés de 400 € en GIR 1, de 250 € en GIR 2, de 150 € en GIR 3 et de 100 € en GIR 4. Cette revalorisation touchera donc tous les bénéficiaires de l’APA, quel que soit leur degré de dépendance.
Exemple : Madame X souffre d’une lourde perte d’autonomie. Elle est en GIR 1. La revalorisation du plafond de son APA lui permettra de bénéficier de près d’une heure de plus par jour d’aide à domicile. Sa voisine, Madame Y, a la chance d’être plus autonome. En GIR 4, elle pourra bénéficier jusqu’à une heure de plus par semaine d’aide à domicile.
Une APA plus accessible grâce à la diminution du reste à charge qui pèse aujourd'hui sur les âgés et leurs familles. Pour la part du plan d’aide comprise entre 350 et 550 euros, le ticket modérateur, c’est-à-dire ce qu’il reste à la personne âgée à payer, pourra baisser jusqu’à 60%. Pour la part du plan d’aide allant au-delà de 550 euros, la baisse pourra atteindre 80%. De plus, aucun bénéficiaire de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (ex minimum vieillesse) n’acquittera plus, désormais, de ticket modérateur.
Exemple : Monsieur V dispose de 1 000 € de ressources mensuelles. En GIR 1, la diminution du reste à charge de son APA représentera une économie annuelle d’environ 1000 euros. S’il était plus autonome, en GIR 4, son économie annuelle atteindrait 250 € par an.
En alliant le bénéfice de l’augmentation des plafonds et de l’allègement du reste à charge, le « gain » mensuel pour une personne disposant de 1 500 € de ressources pourra aller jusqu’à près de 150 € pour les plus autonomes (GIR 4), et pourra atteindre plus de 600 € pour les moins autonomes (GIR 1).
Une APA plus qualifiée, grâce à la professionnalisation des aides à domicile, à l’amélioration de leurs conditions de travail, à la lutte contre la précarisation des salariés et à une meilleure prise en compte de leurs frais professionnels. 25 millions d’euros y seront consacrés chaque année. Il s’agira notamment d’améliorer la situation financière des intervenants à domicile pour les plus bas salaires et de mieux valoriser leurs déplacements, qui font partie intégrante de leur activité. Au total, 375 millions d’euros supplémentaires seront consacrés chaque année à l’APA à domicile.
Simplifier les démarches des âgés et de leurs familles : La loi améliore les dispositifs locaux et nationaux d’information et d’orientation sur les droits, notamment via le futur portail internet porté par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA). Ce portail regroupera des informations sur les établissements et les services utiles à l’accompagnement de la perte d’autonomie pour les âgés et leurs aidants. Il permettra à chaque personne d’accéder à une information claire et accessible et de pouvoir choisir son établissement en connaissant ses droits et les aides qu’elle pourra mobiliser. Pour rendre possible sur ce site la comparaison des prix à prestation donnée, la loi prévoit de normaliser la définition des prestations couvertes par les tarifs. Seront aussi favorisés l’utilisation du chèque emploi service universel (CESU) pour l’APA et le tiers payant pour les services d’aide à domicile.
Reconnaître le rôle des aidants en créant une aide au « répit »: 4,3 millions de personnes aident régulièrement au moins un de leurs proches âgé de 60 ans ou plus à domicile en raison d’une santé altérée ou d’un handicap. 20% des aidants ont des symptômes de fatigue morale ou physique, avec des effets sur leur santé : 40 % des aidants dont la charge est la plus lourde se sentent dépressifs, 29% déclarent consommer des psychotropes.
En outre, les aidants renoncent fréquemment à des soins, faisant passer la santé de l’aidé avant leur propre santé. Une aide au « répit » est créée afin de permettre à l'aidant d’une personne très peu autonome de s'absenter quelques jours en garantissant que le relais sera pris auprès de l’aidé (heures d'aide supplémentaires à domicile voire présence continue ou accueil exceptionnel en accueil de jour ou en hébergement temporaire). D’un montant qui pourra aller jusqu’à 500 euros annuels au-delà du plafond de l’APA, cette aide permettra par exemple à financer sept jours de séjour dans un hébergement temporaire. Elle est ciblée sur les aidants dont les besoins de soutien sont les plus importants. De plus, un dispositif d’urgence est mis en place pour accompagner les aidés dont l'aidant est hospitalisé.
Près de 80 millions d’euros par an seront consacrés à ces deux dispositifs. En outre, les moyens de la CNSA sont renforcés pour contribuer au financement d’actions de soutien et d'accompagnement des aidants (par exemple en développant des « cafés des aidants »), à hauteur de 5 millions d’euros par an.